Famine : polémique autour des politiques agricoles

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L’Ethiopie a distribué 600 000 hectares à des entreprises étrangères entre 2004 et début 2009 (AFP)
Jeune Afrique | 25/08/2011

Corne de l'Afrique
Famine : polémique autour des politiques agricoles

Par Mathieu Olivier

La Chine a débloqué 60 millions de dollars à destination des populations de la Corne de l’Afrique, en proie à la famine. L’Empire du Milieu répond ainsi à ses détracteurs qui l’accusaient de ne pas prendre une part assez importante de l’effort humanitaire. Mais la polémique n’est pas éteinte pour autant. En toile de fond : les politiques agricoles des pays émergents mais aussi de l’Europe.

Les Chinois ont réagi. Le Premier ministre Wen Jiabao a promis le 15 août de verser un don de 353,2 millions de yuans (55,3 millions de dollars) de denrées alimentaires aux pays africains en proie à la sécheresse (Somalie, Djibouti, Kenya, Ethiopie, Erythrée). Une action d’envergure qui s’ajoute aux 90 millions de yuans (un peu moins de 5 milliards de dollars) déjà débloqués mais qui apparaît comme un simple poids de plus dans la balance d’une polémique plus vaste.

Le chargé des affaires africaines du gouvernement allemand, Günther Nooke, a ainsi récemment mis en cause l'achat de terres par la Chine en Ethiopie, durement touchée par l’épisode de famine. « Il est probable que la vente massive de terres à des entreprises ou des États comme la Chine, qui veulent y pratiquer une agriculture intensive, profite à une petite élite », estime-t-il. Et d’ajouter, dans le quotidien « Frankfurter Rundschau » : « Ne consacrer l'agriculture qu'aux exportations peut conduire à de grands conflits sociaux, si de petits paysans perdent leurs terres et leurs moyens de subsistance. »

Développement et menace alimentaire

Davantage que sa volonté d’aider les populations en détresse, les critiques des chancelleries occidentales visent en effet la politique agricole de la Chine mais aussi des autres pays émergents. La question sous-jacente : les investissements étrangers dans les terres africaines sont-elles un facteur de développement, via la mise en place d’infrastructures destinées à accroître la productivité des installations, ou un accaparement des terres et une menace contre la sécurité alimentaire ?

Elément de réponse : l’Ethiopie a distribué 600 000 hectares à des entreprises étrangères entre 2004 et début 2009, d'après un rapport de la FAO (Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture). Officiellement, le pays cherchait ainsi à profiter des techniques de pointe qui lui auraient permis d’exploiter son sol plus efficacement, de créer des emplois et de doubler la production agricole. Mais les résultats se font attendre :  44 % de la population éthiopienne restent sous-alimentés.

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L’un des plus gros locataires de terres africaines n’est autre que le Royaume-Uni.
L’Europe accuse mais n’est pas innocente

A en croire Stacy Feldman, co-fondatrice du site Solve Climate News, la réponse est à chercher du côté de la crise alimentaire de 2008 en particulier. Celle-ci a, selon elle, effrayé les pays émergents qui se sont tournés vers l’Afrique pour leur sécurité alimentaire : « Une grande partie des terres est achetée par les pays émergents pour cultiver des produits agricoles destinés à leur population croissante. Ces pays, Chine, Inde, Corée du sud et États pétroliers du Golfe arabo-persique, disposent de ressources limitées en terres agricoles et en eau sur leur territoire. »

Ainsi, la polémique portant sur l’aide chinoise à l’Ethiopie tient avant tout de la macro-économie - les investissements étrangers sont-ils facteurs de développement ?- et d’une question de conscience – peut-on importer des produits alimentaires d’un pays en proie à la famine ? Et il est sans doute restrictif de confiner la question aux pays émergents.

Car l’Europe n’est pas étrangère au phénomène. L’un des plus gros locataires de terres africaines n’est autre que le Royaume-Uni. Et, si les cultures destinées aux agro-carburants remplacent toujours davantage les exploitations vivrières, l’Union Européenne y est sans doute pour quelque chose : pour Bruxelles, 10 % des carburants utilisés pour le transport devront venir de produits d'origine végétale avant 2015.
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