Un land grab chinois en Afrique sub-saharienne ?

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Outre-Terre 2011/4 (n° 30) Pages 151-170

Un land grab chinois en Afrique sub-saharienne ?

Laurent Hou

On parle depuis quelques années des achats de terres agricoles en Afrique par des acteurs chinois. De tels investissements sont souvent désignés par l’expression land grab qui suggère d’emblée une agression. Il s’agirait, ni plus ni moins, de partir à l’assaut des terres africaines. Comment définir ce land grab ? Tout d’abord, il faut rappeler que si la Chine s’implique dans l’agriculture africaine, cela ne passe pas nécessairement par un accès direct aux terres. Il y a de simples investissements, des créations de petits centres de développement agricoles ou des « fermes de l’amitié » qui visent à développer l’agriculture locale. Une fois que l’on a distingué le land grab de ces autres actions, on s’aperçoit qu’il peut prendre deux formes différentes : achat direct de terres agricoles ou, bien plus souvent, conclusion de baux emphytéotiques de 50 à 99 ans. Par commodité et en dépit de son caractère polémique, on conservera l’expression anglaise land grab car la plupart des discussions sur ce thème utilisent ces mots, de même que l’étude de référence commandée par la Food and Agriculture Organization (FAO). Précisons aussi que nous ne nous intéresserons pas à d’éventuelles prises de contrôle de la terre à des fins d’exploitation minière ou industrielle. Nous cantonnons le land grab à la seule sphère agricole.

L’appropriation des terres africaines par des acteurs étrangers n’est pas nouvelle. Bien entendu, la colonisation en est l’archétype, c’est pourquoi on évoque, pour caractériser ces achats, le « néocolonialisme ». Mais la fin de la période coloniale n’a pas sonné le glas des propriétés agricoles étrangères dans l’ensemble de l’Afrique, même si elle a considérablement fait reculer ce phénomène. Dans le cas de la Chine, il semble qu’il faille faire remonter le land grab à 1995, avec l’implantation de la Zhongkan Farm en Zambie. Il importe toutefois de garder à l’esprit que le land grab est un phénomène mondial qui concerne de vastes régions d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine, voire d’Océanie. La Chine elle-même n’est pas épargnée par ce phénomène puisqu’on y compte au moins deux investissements étrangers de taille dans l’agriculture chinoise assortis de concessions de terrains : un du groupe Goldman Sachs qui a acquis dix fermes de poulets pour 300 millions de dollars ainsi que des élevages porcins dans une fourchette entre 150 et 200 millions de dollars ; un grand projet de l’État singapourien qui correspond davantage à ce qui serait l’essence du land grab, c’est-à-dire l’usage de terres d’une grande superficie à fins stratégiques. Le land grab est donc un phénomène mondial ; l’Afrique sub-saharienne étant le point le plus sensible puisque ses terres attirent tout autant la Chine que d’autre États y compris ceux d’Afrique du Nord.

Lire la suite: http://farmlandgrab.org/uploads/attachment/OUTE_030_0151.pdf

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