[RDC] Agriculture : le secteur au cœur d’une réforme difficile

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Du côté des milieux paysans, la pilule parait amère. Les différentes organisations restent mobilisées pour la réussite des réformes, mais la plupart d’entre elles n’ont pas adhéré à ces modifications qui sont l’œuvre d’une collusion entre le Sénat et le secteur privé. (Photo: ThierryBrésillon/Flickr)
Media Congo | 23.11.2017

Agriculture : le secteur au cœur d’une réforme difficile

La loi dans le domaine est en train de subir un grand toilettage. Dans l’ensemble, il s’agit des modifications plutôt majeures qui s’appliquent à la loi n°11/002 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à l’agriculture. Au moins trois propositions chères au secteur privé ont suscité la colère des milieux paysans pour leur impact négatif sur le secteur.

Aux dernières nouvelles, le projet de loi modifiant et complétant la loi du 24 décembre 2011 a dépassé l’étape de l’examen au Sénat pour la seconde lecture au niveau de l’Assemblée nationale. L’on se prépare à un nouvel affrontement entre le secteur privé et les milieux paysans par le truchement des deux chambres du Parlement. Pour son initiateur, le sénateur Musendu, ces modifications interviennent six ans après l’entrée en vigueur de la loi du 10 janvier 2011 mais son bilan reste très mitigé, voire en deçà des attentes.

Avec ces modifications, l’objectif global poursuivi est de faire sauter les derniers verrous. C’est le cas pour l’accès à la terre destinée à l’agriculture et la participation des étrangers dans le capital social de la société. Désormais, l’État congolais veut, d’une part, s’assurer d’un meilleur accès à la terre agricole pour les nationaux et, d’autre part, drainer plus d’investissements lourds dans le secteur. L’initiateur appuie également sans réserve le renforcement des mécanismes de financement des Congolais dans le secteur agricole. Toutefois, il a rejeté toute visée de nationalisation dans sa démarche.

Du côté des milieux paysans, la pilule parait amère. Les différentes organisations restent mobilisées pour la réussite des réformes, mais la plupart d’entre elles n’ont pas adhéré à ces modifications qui sont l’œuvre d’une collusion entre le Sénat et le secteur privé. Au total, le projet de loi comporte quatre articles. Dans le détail, les principales modifications touchent plusieurs domaines. Il y a, par exemple, l’ouverture du secteur agricole à tous les opérateurs économiques, nationaux et étrangers. Ensuite, l’on cite la réduction de 35 à 20 % du taux d’imposition sur les revenus professionnels des exploitants agricoles industriels. Les changements intègrent aussi la promotion d’une classe moyenne nationale et l’accès au Fonds national de développement agricole réservé aux Congolais. Enfin, il faut évoquer l’exonération de l’impôt sur les revenus professionnels en faveur de l’exploitant agricole familial et de type familial, ou encore la préservation des droits fonciers acquis.

Ces changements représentent autant d’objectifs poursuivis par le législateur dans le cadre de la redynamisation des activités agricoles en RDC. Le modèle minier l’a inspiré, car l’on est passé de moins de 100 000 tonnes de cuivre à un million grâce à cette méthode. On le sait, le secteur privé a exprimé rapidement des préoccupations sur certains points spécifiques de la loi de 2011, dont la question de l’accès à la terre destinée à l’agriculture. La Fédération des entreprises du Congo (FEC) craignait une mise à l’écart des personnes physiques étrangères à l’éligibilité des droits portant sur les terres agricoles et leur participation au sein des sociétés. Bien entendu, il y avait aussi le spectre des nationalisations. La FEC redoute plus que tout que l’État ne procède pas à une autre « zaïrianisation». Pour elle, il n’est pas question de déposséder les étrangers de l’usage de leurs terres.

Avec l’apport du Sénat, la FEC peut se féliciter des changements apportés par le projet. Mais la position est toute autre dans les milieux de la société civile qui accusent le Parlement de mener une politique de porte ouverte préjudiciable au pays à cause du risque d’accaparement des terres agricoles. La fronde la plus importante vient du Cnongd qui est prêt à lancer une campagne citoyenne sur le thème « Non à la porte ouverte sur l’accaparement des terres agricoles en RDC ». Par ailleurs, d’autres organisations paysannes dont la Conapac, la Copaco et l’Unagrico sont en train de réfléchir sur une position commune à défendre afin de ne pas offrir un chèque en blanc aux privés. Elles préparent ainsi une riposte à travers l’Assemblée nationale qui effectue la seconde lecture avant la conciliation finale avec le Sénat.

Laurent Essolomwa
Adiac-Congo / MCN
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