À Montréal, écologistes et défenseurs des droits autochtones disent à Bolsonaro de dégager

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Des dizaines de personnes se sont rassemblées pour protester contre les politiques du président Jair Bolsonaro devant le consulat du Brésil à Montréal, mercredi soir. (Photo: Marie-France Coallier)
Le Devoir | 28 août 2019

À Montréal, écologistes et défenseurs des droits autochtones disent à Bolsonaro de dégager
 
par Alexis Riopel
 
Entre deux notes de bossa nova et quelques « Fora Bolsonaro ! » bien sentis... Galvanisée par les incendies de forêt qui sévissent en Amazonie, une foule de plusieurs dizaines de personnes, compacte et bruyante, a demandé le départ du président brésilien mercredi soir à Montréal.
 
Les manifestants reprochent à Jair Bolsonaro, en poste depuis janvier, d’avoir desserré les règles de protection environnementale et leur application au bénéfice des industries agroalimentaires et minières dont il est proche, mais aussi d’opprimer les peuples autochtones qui occupent ces terres convoitées.
 
« C’est un projet clair de faire de l’Amazonie un vaste terrain de jeu pour l’industrie de la viande et du soya », a fait valoir l’une des organisatrices du rassemblement, Alessandra Devulsky, du Coletivo Brasil-Montréal. Extinction Rébellion Québec — encourageant la désobéissance civile devant l’inaction climatique — et le Comité pour les droits de la personne en Amérique latine ont également participé à l’organisation de cette manifestation.
 
Malgré le temps pluvieux, des manifestants se sont couchés par terre, baignant dans un liquide rouge représentant le sang des peuples autochtones chassés de leurs terres. Le rassemblement avait lieu devant le consulat du Brésil à Montréal.
 
La manifestation constituait évidemment un engagement de solidarité envers les opposants à Jair Bolsonaro au Brésil, mais se réclamait aussi d’une portée canadienne et québécoise. En entrevue, Mme Devulsky a expliqué que plusieurs investisseurs internationaux présents au Brésil contribuent à une gestion des terres non durable et bafouent les droits de la personne. La Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) en ferait partie.
 
L’avocate et directrice juridique de l’Institut Luiz Gama, à São Paulo, qui est également chargée de cours à l’UQAM, cite un fonds de l’entreprise TIAA-CREF détenant des terres agricoles aux États-Unis, en Australie et au Brésil, dans lequel la Caisse a investi 250 millions $US en 2012. Un rapport préparé par l’ONG Grain a fait valoir, en 2015, que cet argent était investi dans des régions du Brésil où les conflits fonciers sont récurrents et où des stratagèmes sont mis en place pour prendre possession des terres utilisées par des autochtones.
 
« Je me demande si les Québécois savent que l’argent de leurs fonds de pension contribue à l’accaparement de terres au Brésil », dit Mme Devulsky.
 
Les orateurs défilant au micro pendant la manifestation ont demandé que la Caisse retire ses pions de ce fonds.
 
Toute l’Amazonie en danger
 
Si un point ralliait tous les manifestants, des jeunes militants d’Extinction Rébellion aux gens d’âge mûr brandissant des drapeaux du Brésil, c’était bien l’urgence d’agir.
 
Mauricio Pupo, un Brésilien ayant émigré au Canada il y a une quinzaine d’années, a décidé de venir manifester à cause de la tragédie actuellement en cours en Amazonie. Mais il s’inquiète aussi de problèmes d’ordre politique à plus long terme.
 
« Bolsonaro laisse brûler l’Amazonie pour favoriser les grands producteurs, dont il représente les intérêts, expose-t-il. Mais actuellement, au Brésil, il y a beaucoup de manifestations contre lui. Les gens veulent la fin de cette dictature cachée, déguisée en démocratie. » M. Pupo dénonce l’entrée en scène du président Bolsonaro à la suite du « coup d’État » dont a été victime la présidente Dilma Rousseff en 2016.
 
Johanna Martínez, une jeune femme originaire de la Colombie, précise que la forêt amazonienne n’est pas en danger seulement au Brésil. « Presque tous les présidents d’Amérique du Sud ne respectent pas leurs propres politiques environnementales. La déforestation de l’Amazonie, cela se fait aussi en Bolivie, au Pérou, en Colombie et au Vénézuela », dit-elle.
 
L’équivalent du Luxembourg ravagé par les flammes en juillet
 
Ce mois-ci, plus de 27 000 incendies de forêt ont fait rage en Amazonie. Ce phénomène survient chaque année quand les fermiers brûlent des terres agricoles destinées à l’agriculture ou au pâturage, ou encore quand ils veulent exploiter une nouvelle parcelle de forêt. Les feux de cette année sont les plus intenses en une décennie.
 
Quand de nouveaux secteurs de la forêt brûlent, une énorme quantité de dioxyde de carbone est libérée dans l’atmosphère, ce qui contribue aux changements climatiques.
 
Selon l’Institut national de recherches spatiales du Brésil, qui examine les images satellites du pays, la surface déforestée a augmenté de 67 % au cours des sept premiers mois de 2019 — et des sept premiers mois de la présidence de Jair Bolsonaro. En juillet seulement, une surface de la grandeur du Luxembourg a été détruite dans l’Amazonie brésilienne.
 
 
 
Une version précédente de cet article, qui indiquait qu’Alessandra Devulsky était professeure détachée de l’Université Nove de Julho (Brésil), a été corrigée.
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