Golden Veroleum Liberia dit « à plus tard » à la RSPO, ou serait-ce « adieu » ?
by Tom Lomax
En réponse au verdict accablant rendu par le Comité des plaintes de la RSPO concernant GOLDEN VEROLEUM LIBERIA (GVL) – verdict maintenu en appel (voir le dossier au complet ici) – GVL a annoncé sa décision de « retirer temporairement » son adhésion à la RSPO.
Cette décision semble avoir été autorisée par son principal investisseur, le géant de la production d’huile de palme enregistré à Singapour Golden Agri-Resources (GAR), mettant sans doute GAR lui-même en situation de violation du Code de conduite de la RSPO. Cela devrait sonner l’alarme pour les investisseurs et les clients de GAR à la lumière d'un récent rapport des Amis de la terre mentionnant les liens financiers entre GAR et d’importantes firmes mondiales, telles que BlackRock, Vanguard, Rabobank, Citibank, Robeco, Northern Trust et la firme anglaise Silchester International Investors, ainsi que pour les acheteurs de GAR, notamment Nestlé, Procter & Gamble, Unilever, PZ Cussons et PepsiCo.
La concession d’huile de palme de GVL au Libéria est controversée depuis le début. Compte tenu de l’attachement indéfectible de GVL au modèle de concession « terres bon marché – communautés bon marché », qui fait payer le prix à l’environnement et aux droits humains, cela n’a rien d’étonnant. Ce ne sera pas étonnant non plus pour la communauté et les acteurs de la société civile libérienne qui se sont lassés d'entendre la rhétorique de « leader du marché » de GVL, alors qu’ils dénoncent l’entreprise auprès de la RSPO pour avoir pris les terres des communautés sans leur consentement, pillé des lieux de sépulture, rasé des forêts très hautes et, dernièrement, pour avoir construit leur première usine de transformation sur la colline sacrée de la communauté blogbo.
Le Groupe de travail de la société civile sur le palmier à huile du Libéria a déclaré que la décision de GVL de se retirer « traduit un manque d’engagement à se conformer totalement aux lois libériennes, à respecter les droits humains et à protéger l’environnement ». Tout en exprimant sa déception et son inquiétude face à la décision, le Groupe de travail a signalé que celle-ci vient rappeler au Libéria qu'il est nécessaire d'adopter une loi tant attendue sur les droits fonciers qui assure véritablement une protection juridiquement contraignante pour les droits fonciers des communautés, plutôt que la simple réglementation volontaire offerte par la RSPO.
Dans son annonce du retrait apparemment temporaire de GVL en même temps qu’il présentait son plan durable, le tout nouveau DG de GVL, Patrice Lobet, a affirmé que « la meilleure façon dont GVL peut honorer l’esprit des Principes et critères de la RSPO, c’est en se retirant ».
On ne sait pas très bien comment GVL peut espérer éviter les contradictions évidentes entre sa déclaration publique et ses actions, alors que ses véritables intentions semblent claires : GVL rejette le jugement et les recommandations de la RSPO et, en renonçant à sa qualité de membre, tente d’éviter d’avoir à rendre des comptes. Cette décision vient rallonger considérablement, et non raccourcir, le chemin menant à la prétendue durabilité de GVL et semble en fait venir enterrer à tout jamais les chances d’obtenir une certification crédible de production durable de l’huile de palme.
Les actions de GVL nuiront aussi inévitablement à la crédibilité de la RSPO, une critique répétée de ce système de certification étant que les entreprises peuvent facilement éviter d'avoir à respecter sa norme de durabilité en retirant leur adhésion. La RSPO se fera demander d’élaborer des procédures visant à décourager et à sanctionner les entreprises qui renoncent à leur qualité des membres alors que des plaintes restent en suspens. Ceci dit, la RSPO a aussi d’énormes mérites. Malgré une démarche tortueuse et frustrante pour les plaignants, la RSPO a renforcé son système de plainte et s’est montrée disposée à condamner les entreprises membres qui enfreignent sa norme. Il est à espérer que cela servira d’avertissement pour d’autres entreprises qui tenteraient d’utiliser leur statut de membre pour masquer des pratiques non durables, pourvu que la RSPO soit aussi ferme par rapport au principal investisseur de GVL, GAR.