FIAN International et Focus on the Global South | 3 juin 2025
Les accaparements de terres illustrent les inégalités de richesse croissantes et le besoin de réforme
Des investisseurs internationaux et des sociétés richissimes achètent de vastes étendues de terres dans les pays du Sud, alimentant ainsi les inégalités croissantes, dans le cadre d'une tendance mondiale au transfert de richesses au détriment des plus pauvres et des travailleur∙euse∙s.
Le rapport de FIAN International et Focus on the Global South, Les seigneurs de la terre : propriétaires fonciers transnationaux, inégalités et plaidoyer pour la redistribution, braque les projecteurs sur les dix plus grands propriétaires fonciers transnationaux du monde, qui contrôlent 404 457 km², soit une superficie équivalente à celle du Japon.
Ce phénomène s'inscrit dans le cadre d'une ruée mondiale sur les terres. Depuis 2000, les entreprises et les investisseurs financiers ont acquis environ 65 millions d'hectares de terres, soit deux fois la superficie de l'Allemagne. Aujourd'hui, 70 % des terres agricoles mondiales sont contrôlées par les 1 % d'exploitations industrielles géantes les plus importantes.
Déplacements forces
Elle a des conséquences majeures sur la sécurité alimentaire, menaçant les moyens de subsistance de 2,5 milliards de petits exploitants agricoles et de 1,4 milliard de personnes parmi les plus pauvres de la planète, dont la plupart dépendent de l'agriculture pour survivre. Elle est également à l'origine de violences, d'expulsions forcées, de destruction de l'environnement et contribue au changement climatique. Pratiquement tous les grands propriétaires fonciers mondiaux ont été impliqués dans des rapports faisant état de déplacements forcés, de destruction de l'environnement et de violences à l'encontre des communautés.
L'un des principaux acteurs est le fonds de pension américain TIAA, qui a acquis 61 000 hectares dans la région brésilienne du Cerrado, l'une des zones les plus riches en biodiversité au monde. Dans le Cerrado, près de la moitié des terres ont été converties en plantations d'arbres, en grandes monocultures agro-industrielles et en pâturages pour l'élevage bovin, dans un contexte d'accaparement violent de terres, de déforestation et de destruction de l'environnement qui montre déjà des signes d'impact sur le climat.
La TIAA a presque quadruplé ses avoirs fonciers mondiaux entre 2012 et 2023, passant de 328 200 hectares à 1,2 million d'hectares.
Inégalités
La concentration des terres affecte le monde entier. Le fait de permettre que de vastes étendues de terres situées dans des États différents soient contrôlées par des entreprises étrangères sape la souveraineté des États et l'autodétermination des peuples.
La monoculture à l'échelle industrielle, souvent pratiquée sur ces terres, est l'un des principaux facteurs du changement climatique, de la perte de biodiversité et de la destruction des écosystèmes, empêchant des transitions justes vers des systèmes alimentaires et des modèles économiques plus équitables et durables.
Cette évolution résulte d'une tendance mondiale à l'accroissement des inégalités et à la concentration des richesses. Depuis le milieu des années 1990, les 1 % les plus riches de la population mondiale ont accaparé 38 % de toutes les richesses supplémentaires accumulées, tandis que les 50 % les plus pauvres n'en ont bénéficié que de 2 %. On estime que 3,6 milliards de personnes, soit 44 % de la population mondiale, vivent aujourd'hui avec moins de 6,85 dollars par jour, un niveau qui ne permet pas de mener une vie digne.
L'accaparement des terres résultant en grande partie du capital mondial et de l'accumulation de terres par les sociétés transnationales et les entités financières par-delà les juridictions, la coopération internationale est essentielle. La Conférence internationale sur la réforme agraire et le développement rural (CIRADR+20) qui se tiendra en Colombie au début de l'année prochaine est une occasion unique pour les gouvernements de convenir de mesures visant à mettre fin à l'accaparement des terres, à inverser la concentration des terres et à garantir une distribution large et durable des ressources naturelles.
Dans un monde confronté à des crises interdépendantes - dégradation du climat, insécurité alimentaire, pauvreté persistante et inégalités sociales - et à une reconfiguration de l'équilibre mondial des pouvoirs, il est possible de s'éloigner des politiques néolibérales qui ont profité à un très petit nombre et de créer un avenir mondial plus juste et plus durable pour toutes et tous.
Pour de plus amples informations ou des interviews avec les médias, veuillez contacter Philip Seufert [email protected] ou Tom Sullivan [email protected]