Accaparement des terres agricoles en Bretagne : une menace silencieuse pour nos campagnes

Accaparement des terres agricoles en Bretagne : photo header Pixabay @Franz26
NHU 11.6.2025

Accaparement des terres agricoles en Bretagne : une menace silencieuse pour nos campagnes

L’agriculture bretonne traverse une crise silencieuse. Une menace discrète, mais bien réelle : l’accaparement des terres agricoles. Ce phénomène, souvent associé à d’autres continents, touche désormais la Bretagne. Derrière des achats discrets, parfois opaques, se joue un bouleversement majeur du modèle agricole breton.

Une pression foncière croissante en Bretagne

Depuis plusieurs années, le prix des terres agricoles en Bretagne ne cesse d’augmenter. Cette hausse est alimentée par une demande soutenue. Pourquoi ? Le pays attire pour ses terres fertiles, son climat doux, et sa situation géographique stratégique. Proche de la mer, bien desservie, la Bretagne attire autant les investisseurs agro-industriels que les projets spéculatifs.

Par ailleurs, de nombreuses exploitations bretonnes sont aujourd’hui à vendre. En cause : le départ à la retraite de milliers d’agriculteurs bretons. Faute de repreneurs locaux, leurs terres deviennent des cibles faciles.

L’agriculture paysanne en danger

Le phénomène n’est pas anodin. Il remet en cause l’équilibre rural. En Bretagne, l’agriculture familiale dominait encore il y a peu. Aujourd’hui, elle recule. Les exploitations s’agrandissent, mais leur nombre diminue. Et surtout, elles changent de main. Moins de jeunes paysans, plus de structures capitalistiques.

Les jeunes agriculteurs bretons peinent à accéder au foncier. Les prix s’envolent. Les terrains sont souvent préemptés avant même d’être mis en vente officiellement. Cette situation freine les projets d’installation, surtout ceux en agriculture biologique ou en circuits courts.

Qui achète les terres agricoles bretonnes ?

Dans cette ruée vers la terre bretonne, plusieurs types d’acteurs émergent. Des fonds d’investissement, des sociétés agroalimentaires, mais aussi des industriels cherchant à diversifier leurs actifs. Certains rachètent des exploitations entières, parfois via des montages juridiques complexes.

Autre tendance inquiétante : l’arrivée de néo-ruraux fortunés. Ils achètent d’anciens corps de ferme pour en faire des résidences secondaires ou des propriétés de prestige. Ces achats, bien que ponctuels, réduisent encore davantage les surfaces disponibles pour les agriculteurs.

Des projets agricoles déconnectés du territoire

Trop souvent, ces nouvelles structures sont déconnectées du tissu local. Elles pratiquent une agriculture intensive, parfois hors sol, avec peu d’emplois à la clé. Les liens humains, culturels et économiques avec la commune s’estompent.

Cette logique industrielle fragilise aussi les équilibres naturels.
L’eau est surexploitée.
Les sols sont appauvris.
La biodiversité recule.
Les paysages changent, au détriment du patrimoine rural.

Des cas concrets en Bretagne

En Loire-Atlantique, dans le sud du pays, plusieurs exploitations laitières ont été rachetées par des groupes agroalimentaires. Certains agriculteurs dénoncent des prix de rachat bien supérieurs au marché, faussant la concurrence. Dans le Centre-Bretagne, des centaines d’hectares ont changé de main en quelques mois. Peu de transparence, peu d’ancrage local.

Parfois, même les mairies ignorent qui est le véritable propriétaire. Les sociétés écran, domiciliées à l’étranger, Paris ou plus loin encore, masquent l’identité des acheteurs. Cette opacité alimente les tensions.

Résistances et alternatives locales

Heureusement, la Bretagne n’est pas sans défense. La SAFER Bretagne, organisme chargé de réguler le marché foncier rural, joue un rôle de veille. Mais ses moyens sont limités. Et elle ne peut pas toujours préempter à temps.

Face à cela, des initiatives citoyennes émergent. Des coopératives agricoles se créent pour acheter collectivement des terres. Des foncières solidaires, comme Terre de Liens, soutiennent des projets d’agriculture durable. Certaines communes réservent du foncier à des jeunes paysans en bio.

Ces résistances, bien que minoritaires, montrent que d’autres modèles sont possibles. Mais elles nécessitent soutien politique et mobilisation collective.

Une bataille pour l’avenir de la Bretagne

Le foncier agricole n’est pas un bien comme un autre. En Bretagne, il est au cœur de notre identité, de notre autonomie alimentaire, et de nos paysages. Laisser les terres aux mains de structures éloignées, c’est aussi perdre une partie de notre souveraineté.

L’agriculture bretonne mérite mieux que la logique du profit à court terme.
Elle a besoin de paysans enracinés, de fermes à taille humaine, de transmissions équitables.
Il est urgent de replacer le foncier au cœur des politiques publiques bretonnes.
L’accaparement des terres en Bretagne n’est plus un risque : c’est devenu une réalité.
Pour défendre notre agriculture, notre pays et nos valeurs, il faut agir. Collectivement, lucidement. Car ce qui est en jeu, ce n’est pas seulement la propriété d’un champ.
C’est l’avenir de la Bretagne rurale.


  •   NHU
  • 11 June 2025

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