L'homme d'affaires Hubert Fabri condamné pour corruption active

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Source : FeedYeti
L'Echo | 29 juin 2018

L'homme d'affaires Hubert Fabri condamné pour corruption active

Le patron du groupe belge Socfin a été déclaré coupable d’avoir été à la tête d’un "schéma de corruption" bénéficiant à une haute fonctionnaire guinéenne. Les faits éclaboussent jusqu’au Premier ministre guinéen.

Le tribunal correctionnel de Bruxelles a condamné vendredi Hubert Fabri et quatre de ses hauts cadres à des peines de 12 mois de prison et 6.000 euros d’amende, le tout avec sursis. Tous ont été déclarés coupables de corruption active dans le dossier de la galaxie Socfin. L’actuelle ministre de l’Agriculture de Guinée, Mariama Camara, est-elle condamnée à 20 mois de prison avec sursis et 12.000 euros d’amende, ainsi que plus de 300.000 euros de confiscation.

"Schéma de corruption"

La juge Anne Carlier a estimé que les sociétés du groupe belge Socfin, géant mondial du caoutchouc et de l’huile de palme (45.000 employés à travers le monde, principalement en Afrique et Asie du Sud-Est) avait, via ses dirigeants, organisé un système de corruption pour s’attirer les faveurs des autorités publiques guinéennes, dans les années 2000.

Socfin est détenu à 38,7% par l’industriel français Vincent Bolloré, ami proche d’Hubert Fabri et lui aussi inculpé pour corruption pour des faits présumés notamment commis en Guinée. Le tribunal a considéré que Mariama Camara, "en sa qualité de fonctionnaire publique, a sollicité auprès du groupe Socfin une rémunération" et que "Socfin a proposé un schéma de paiement".

La Guinée éclaboussée

Celui-ci, nommé "schéma de corruption" par la juge, prévoyait que Mariama Camara, ancienne patronne de la Soguipah, société nationale guinéenne s’occupant du caoutchouc et de l’huile de palme, reçoive 6% du prix d’achat du caoutchouc, transférés sur son compte via la société WAT (pour West African Trading), société-écran basée à Guernesey et détentrice des contrats de commercialisation entre les plantations du groupe Socfin et la Soguipah. Pour le tribunal, les "actes de corruption ont été dissimulés par la convention qui est entièrement fausse".

Hubert Fabri, actionnaire majoritaire du groupe, a "cautionné le schéma de paiement en faveur de Mariama Camara. Il disposait d’une procuration sur les comptes de WAT."

Dans son jugement, le tribunal s’est aussi longuement attardé sur les autres destinataires des paiements effectués par la société WAT. Il apparaît, selon la justice, que celle-ci a versé de l’argent sur les comptes de toute une série de dignitaires guinéens, parmi lesquels l’ancien ministre et ambassadeur de Guinée à Bruxelles Kazaliou Baldé, décédé en 2012. Et surtout l’ancien ministre des Finances du pays, Ibrahima Fofana, aurait, bénéficié d’un versement d’environ 50.000 euros. Cet homme a été nommé Premier ministre par le président Alpha Condé, le 17 mai dernier. Et Mariama Camara fait donc partie de son gouvernement.

À côté "pour nos amis"

Dans les courriels saisis lors des perquisitions à l’origine de l’enquête, les correspondants évoquaient des "transactions pouvant sembler étranges pour les normes européennes, mais il ne faut pas oublier que l’on est en Afrique." Il était également fait mention "d’à-côtés pour nos amis".

Tous les prévenus ont été acquittés des faits de blanchiment et d’abus de biens sociaux. Par ailleurs, l’un d’entre eux a bénéficié de la prescription des faits.

Contrairement aux plaidoiries des avocats de la défense, le tribunal a considéré qu’il était territorialement compétent pour juger les faits, et que l’enquête n’avait été ni déloyale, ni illégale. Tous les prévenus disposent d’un mois pour faire appel. Le marathon judiciaire se poursuit pour Hubert Fabri, qui attend l’arrêt de la cour d’appel de Bruxelles le 25 septembre dans le volet fiscal de ce dossier, à l’origine de l’enquête qui a abouti, ce matin, à sa condamnation.

Julien Balboni

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La Libre | 29 juin 2018

Les rois belges du caoutchouc condamnés


Faire des affaires avec un gouvernement africain peut-il autoriser une entreprise à prendre des libertés avec les pratiques des affaires ayant cours en Europe ? Le tribunal correctionnel de Bruxelles a clairement répondu par la négative vendredi dans le dossier de la Socfin (Société financière des caoutchoucs créée en 1909 par Adrien Hallet).

Des dirigeants de la Socfin étaient poursuivis pour des faits de corruption de la dirigeante de la Société guinéenne des palmiers à huile et de l’hévéa (Soguipah, à 100 % publique). “Quel que soit le contexte, la corruption est inadmissible”, a ainsi relevé dans son jugement la présidente du tribunal, tout en soulignant qu’il n’y avait pas eu le moindre gain personnel pour les Belges qui dirigeaient le groupe Socfin.

La Socfin rachetait la totalité de la production de caoutchouc de la Soguipah. Des contrats, adaptés au fil des ans, ont été conclus avec cette société publique qui a été dirigée pendant 30 ans par Mariame Camara. Les relations n’ont pas toujours été faciles avec les partenaires guinéens.

La “belle Mariame” entre en scène

Des documents, découverts à la Socfin, ont montré que la Soguipah ne touchait pas le juste prix pour son caoutchouc. Il était prévu qu’il était acheté à 6 % en dessous des cours mondiaux. Cette différence transitait par l’offshore WAT (West African Trading). Elle aboutissait sur des comptes en Suisse contrôlés par Mme Camara.

Cette dernière, a encore relevé le tribunal, semblait davantage défendre les intérêts de la Socfin que ceux du gouvernement guinéen, ce qui avait fait dire à un des acteurs du dossier que “tant que la belle Mariame sera là, il n’y aura pas de crainte à avoir”.

Diplomates, politiques et hommes d'affaires arrosés

L’enquête a permis de déterminer que Mme Camara a notamment utilisé l’argent pour acquérir des biens immobiliers en France et y effectuer des travaux. Elle a aussi effectué des prélèvements en cash pour près d’un million et demi d’euros. Elle a “arrosé” pour plusieurs centaines de milliers d’euros des diplomates, des politiques et des hommes d’affaires.

Le tribunal a cependant relevé qu’il n’y avait pas eu d’enrichissement personnel pour les dirigeants belges du groupe Socfin. Elle a condamné quatre de ses dirigeants, dont Luc Fabri (qui en est actionnaire à 50 %, pour 38 % pour le groupe Bolloré) à 12 mois de prison et à 3 000 euros d’amende, le tout avec sursis. Le comptable s’est vu infliger 6 mois et 3 000 euros avec sursis.

Mariame Camara écope de la peine la plus lourde : 20 mois avec sursis et 12 000 euros ferme. Bien que représentée par un avocat au tribunal, elle a toujours refusé de venir à Bruxelles pour y être entendue par les enquêteurs ou pour s’expliquer devant le tribunal.

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Le Quotidien | le 30/06/18

Belgique : un associé de Bolloré condamné pour corruption

Hubert Fabri, le patron de la multinationale luxembourgeoise Socfin, dont le groupe Bolloré est actionnaire, a été condamné vendredi pour corruption active par le tribunal correctionnel de Bruxelles.

Hubert Fabri et quatre dirigeants de filiales du groupe Socfin, ont été reconnus coupables de corruption active dans une affaire de versements de pots de vin en faveur d’une ancienne haut fonctionnaire guinéenne, devenue entre-temps ministre de l’Agriculture du pays ouest-africain. Ils ont écopé de 12 mois de prison et 6.000 euros d’amende, le tout avec sursis. La peine la plus lourde a été prononcée à l’encontre de Mariama Camara, la ministre guinéenne, condamnée à 20 mois de prison avec sursis, 12.000 euros d’amende et à la confiscation de 300.000 euros.

Le groupe Bolloré, dirigé par le milliardaire français est actionnaire à hauteur de 37,8% du groupe Socfin, multinationale luxembourgeoise spécialisée dans l’huile de palmes et le caoutchouc. Socfin emploie 45.000 personnes, en majorité dans ses plantations en Afrique et en Asie. L’homme d’affaires belge Hubert Fabri détient 50,2% du groupe qui contrôle en totalité ou partiellement 39 filiales dans le monde, donc cinq en Belgique.

Les faits de corruption jugés devant la juridiction belge remontent au début des années 2000 quand Mariama Camara était à la tête de la Soguipah, une entreprise publique active dans les secteurs de l’huile de palme et du caoutchouc, qu’elle a dirigée pendant plus de trente ans avant d’être nommée au gouvernement le 27 décembre dernier.

6% du prix de vente

Dans son jugement rendu vendredi, le tribunal constate qu’elle a « en sa qualité de fonctionnaire publique, sollicité auprès du groupe Socfin une rémunération ». Une demande auquel le groupe a donné suite en proposant «un schéma de paiement ».  L’arrangement prévoyait que Mariama Camara perçoive 6% du prix de vente du caoutchouc, versé sur ses comptes via une société écran dans les îles anglo-normandes. Selon les juges, Hubert Fabri, 66 ans, a « cautionné » ce schéma.

Le parquet, à l’origine des poursuites, avait évoqué la somme de 4,2 millions d’euros transférée sur des comptes en France et en Suisse.

La défense, qui avait plaidé l’incompétence territoriale de la juridiction ainsi que l’illégalité et la déloyauté de l’enquête lors des audiences début juin, n’a pas annoncé immédiatement si Hubert Fabri ou les autres condamnés faisaient appel du jugement.

Fabien Grasser

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