Contre l’accaparement des terres dans l’espace ouest-africain : Les activistes en tournée dans 5 pays

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Le quotidien | 3 décembre 2021

Sensibilisation – Contre l’accaparement des terres dans l’espace ouest-africain : Les activistes en tournée dans 5 pays

La 3e édition de la caravane ouest-africaine pour lutter contre l’accaparement des terres, entamée le 20 novembre, va s’achever le 11 décembre prochain en Sierra Leone. Composés d’activistes, de défenseurs des communautés ouest-africaines contre l’accaparement de leurs terres, les caravaniers auront visité 5 pays, que sont la Gambie, le Sénégal, la Guinée-Bissau, la Guinée-Conakry et la Sierra Leone, où des recommandations seront faites à l’endroit des décideurs politiques, ainsi que des leaders communautaires.

Par Abdoulaye KAMARA – [email protected]

Les pays de l’Afrique de l’Ouest devront leur développement économique à la bonne gestion des ressources foncières et naturelles. Cela parce qu’on estime à 60% le nombre d’habitants de cet espace, qui vivent dans le monde rural à travers l’exploitation des terres et ressources naturelles. Malheu­reu­sement, ces populations et leurs activités économiques sont menacées par le phénomène de l’accaparement des terres, par de riches agro-businessmen, et par l’utilisation incontrôlée des intrants chimiques dans l’agriculture. C’est cette réalité que dénonce la Convergence globale des luttes pour la terre et l’eau ouest-africaine (Cglte-Oa), à travers l’organisation d’une caravane qui va mener une campagne de plaidoyer et de sensibilisation dans 5 pays de l’Afrique de l’Ouest.

Entamée le 20 novembre passé en Gambie, la campagne va traverser le Sénégal, la Guinée-Conakry, la Guinée-Bissau, puis la Sierra Leone où elle sera clôturée le 11 décembre, par des recommandations fortes faites à l’endroit des décideurs politiques par la Cglte-Oa, en collaboration avec les chefs coutumiers des différents pays membres, en présence du chef de l’Etat-hôte.

La caravane, en provenance de la Guinée-Bissau pour rejoindre la Guinée-Conakry, a fait un arrêt lundi dernier, à Vélingara. Le chargé de la communication de la Cglte-Oa, le Malien Moussa Couli­baly, a levé un coin du voile sur les motivations de ses initiateurs. Il dit : «Nos paysans sont confrontés à l’accaparement de leurs terres. Pour nous, la terre c’est la dignité de tout être humain. Un beau matin, on vient vous dire que vos terres ont désormais de nouveaux propriétaires. Et comme cela se passe pratiquement dans tous les pays de l’Afrique, nous nous sommes dit que nous devons lutter contre ce fléau. C’est pourquoi la Cglte-Oa a initié, dans son plan d’action, l’organisation d’une caravane sous-régionale chaque 2 ans. La première édition a eu lieu en 2016, la 2ème en 2018 et nous sommes à la 3ème édition, qui a commencé en Gambie le 20 novembre, sur le thème d’accaparement des terres.» En Guinée-Bissau, les caravaniers, qui viennent de 10 pays de l’Afrique de l’Ouest, ont visité des terres qui ont fait l’objet d’accaparement et des sites en litige foncier, avant de rencontrer le chef de l’Etat, Oumarou Sissoko Mballo. «Il a accepté d’âtre notre porte-parole», informe M. Coulibaly.

En République de Guinée, l’étape a été entamée hier et sera concentrée sur la présence des investisseurs. «La question des ressources minières va être débattue à Bofa et Dubréka. Puisque les mines attirent les investisseurs et les sites sont souvent octroyés au détriment des populations autochtones», enchaîne-t-il.

La caravane va être clôturée en Sierra Leone, le 11 décembre, au cours d’une cérémonie officielle qui sera présidée par le chef de l’Etat. «Nous lui remettrons notre livret vert, dans lequel se trouvent nos propositions pour une meilleure gouvernance foncière et qu’il doit, à son tour, transmettre à ses pairs de la Cedeao», ajoute Moussa Coulibaly, chargé de la communication de la Cglte-Oa.

La Cglte-Oa a conscience qu’elle a engagé un combat de longue haleine, qu’elle ne saurait gagner seule. Aussi, y a-t-elle associé les chefs coutumiers. Car, «ce sont les vrais détenteurs de savoirs et pouvoirs relatifs au foncier et sont plus proches des communautés. Ils vont aussi mener le combat à nos côtés, en insistant particulièrement sur l’accès des jeunes et femmes à la terre. Des chefs coutumiers d’une dizaine de pays vont participer à une rencontre et produire un document de plaidoyer».

Le mode opératoire des agro-business

Par ailleurs, le chargé de communication de la Cglte-Oa a une idée sur le modus operandi des multinationales qui viennent en Afrique chercher des terres pour étendre ou fructifier davantage leur business. «Le constat est que, dans toutes les communautés, des hommes riches viennent, berner en quelque sorte, en disant qu’ils ont besoin de ces terres et, en contrepartie, vont trouver les moyens de développer la localité. Une fois l’accord conclu, ils doublent, voire triplent, l’espace convenue avec la complicité d’autres acteurs influents du terroir et, du coup, les communautés se voient dépossédées de leurs terres. D’autre part, ils créent des conflits entre autochtones ; diviser pour mieux régner, pour pouvoir mieux asseoir leur présence», insiste M. Coulibaly.

La Convergence des luttes pour la terre et l’eau recommande, aux différents pays d’Afrique de l’Ouest, d’impliquer les communautés dans la gestion des terres et donc leur accord éclairé sur l’arrivée de grands exploitants agricoles ou miniers. Les associations membres encouragent le développement de l’agro-écologie «pour pouvoir nous affranchir des lourdes dettes d’engrais chimiques, d’herbicides qui nous appauvrissent, mais qui tuent aussi nos sols», insiste Moussa Coulibaly, chargé de la communication de la Cglte-Oa.

En outre, les caravaniers africains pensent qu’il est temps que les communautés se mobilisent, pour faire face à ce phénomène d’accaparement de leurs terres. «Au niveau législatif, il faut qu’il y ait des textes valables, qui puissent reconnaître les droits coutumiers progressistes, utiles aux communautés pour conserver leurs terres. Il est temps que les propriétaires des terres, qui étaient là avant l’Etat, puissent être valorisés pour instaurer la paix, une paix durable. Pour cela, il faut établir une synergie d’actions entre différents acteurs ; et pour ce faire, il faut créer une plateforme multi-acteurs entre les autorités et les communautés. Parce qu’il existe un fossé entre les décideurs politiques et les communautés», poursuit Moussa Coulibaly.

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