Vincent Bolloré désigné comme accapareur de terres et censeur d’internet au Palais de justice de Paris

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Procès de Bolloré contre Bastamag, à la 17e chambre du tribunal de grande instance de Paris, le 11 février 2016. Lily La Fronde/Illustration

Reporterre | 13 février 2016 

Vincent Bolloré désigné comme accapareur de terres et censeur d’internet au Palais de justice de Paris

Barnabé Binctin et Hervé Kempf (Reporterre) 

M. Bolloré déteste que l’on s’intéresse à ses activités africaines. De nombreux éléments attestent qu’il pratique « l’accaparement de terres » en Afrique et en Asie, comme l’avait décortiqué Bastamag. Le milliardaire a poursuivi le site d’information et d’autres sites ayant relayé l’enquête. Mais le procès s’est retourné contre l’industriel.

Peut-on mener une enquête critique sur les activités du groupe Bolloré en Afrique et en Asie ? La reprise d’articles d’enquêtes sur Internet, comme dans les revues de presse, est-elle possible sans menace juridique ? Telles ont été les deux questions posées jeudi 11 février au sein de la XVIIe chambre correctionnelle du Palais de Justice de Paris. Deux questions essentielles pour la liberté d’informer.

Le motif en était la poursuite engagée par Vincent Bolloré contre un article publié par le site Bastamag. M. Bolloré ne poursuit pas seulement ce site d’information, mais aussi ceux qui l’ont relayé par des liens hypertextes ou par des extraits, à savoir Rue 89, la journaliste Dominique Martin-Ferrari, et deux blogueurs, Thierry Lamireau et Laurent Ménard.

M. Bolloré, classé 9e fortune de France, attaque pour "diffamation publique envers un particulier" un article de synthèse publié par Bastamag en octobre 2012 - signalé à l’époque par Reporterre - et consacré à la question de l’accaparement des terres, ces appropriations de surfaces agricoles à grande échelle par des fonds d’investissements ou des multinationales, principalement en Afrique et en Asie.

L’audience a commencé par une discussion sur le fond de l’article, rédigé par Nadia Djabali et édité par Ivan du Roy et Agnès Rousseaux. L’article consistait en une enquête sur les investissements réalisés dans l’acquisition de terres dans des pays du Sud par plusieurs groupes français, comme Axa, Louis Dreyfus, le Crédit Agricole ou Bolloré.

La présidente du tribunal, Fabienne Siredey-Garnier, a d’abord invité Nadia Djabali à préciser sa démarche journalistique. Dans la foulée de la crise financière de 2008, a expliqué celle-ci, de nombreux spéculateurs se sont détournés des marchés financiers pour placer leurs fonds dans l’achat de terres dans des pays pauvres. Or, en 2012, peu d’information existait autour de l’action des groupes français. Mme Djabali a donc enquêté sur ceux-ci, en s’appuyant sur de nombreux rapports d’ONG ou d’institutions internationales.

La présidente s’est ensuite intéressée aux ramifications du groupe Bolloré. Enjeu : savoir si le raccourci consistant à citer celui-ci - notamment dans le titre de l’article - plutôt que ses filiales, au nom moins connu, était admissible. La structure du groupe est en effet complexe, comme le montre un organigramme examiné pendant l’audience, et publié par Les Echos en 2000.

Il est apparu que la principale société concernée, la Socfin, est détenue à près de 39 % par Bolloré, qui en est donc le principal actionnaire et décideur. "D’où, concluait la présidente, le raccourci possible de parler de Bolloré sans détailler à chaque fois".

Le sérieux de l’enquête journalistique a ensuite été discuté. L’abondance des sources et leur sérieux est peu contestable. Mais y a-t-il eu démarche contradictoire ? "Avez-vous contacté Bolloré ?“, interroge la juge. "Non, répond Nadia Djabali, "mais j’étais en possession de réponses écrites de sociétés du groupe à un rapport les critiquant, et j’en ai fait mention."

« L’accaparement des terres est une criminalité écologique »

Plusieurs témoignages attestaient ensuite de la gravité du phénomène de l’accaparement des terres. Mathieu Perdriault, de l’association de chercheurs Agter, spécialiste de ce phénomène, en expliquait l’importance :

"C’est une question de société aux enjeux très forts, du même ordre que le changement climatique. Il s’agit d’une exclusion de fait des petits paysans. Nous affirmons avec force études que l’agriculture capitaliste à salariés ne fournira jamais autant d’emplois que l’agriculture familiale. 
- Bolloré est-il un acteur de vos travaux ?, enchaînait la juge.
- Oui, comme beaucoup d’autres. Il obéit aux objectifs de rentabilité du capital investi.
- Peut-on employer le mot ’extorquées’, à propos des terres qui ont été prises aux paysans ?, interrogeait l’avocat de Basta et de Rue 89, Me Antoine Comte.
- Il est très largement valable dans la majorité des cas."

Eloïse Maulet, de React, une association regroupant les collectifs de paysans africains victimes du groupe Bolloré, attestait ensuite que M. Bolloré lui-même était venu rencontrer des représentants de ces paysans quand ils étaient venus à Paris en juin 2013, quelques mois après la parution de l’article, comme l’avait relaté Reporterre.

Noël Mamère, député écologiste appelé comme témoin, estimait ensuite que l’accaparement des terres dans les anciennes colonies françaises est "la continuation de ce que l’on a pratiqué avec l’esclavage et le pillage des matières premières". "Il faut se poser la question du caractère commun des terres qui doivent nourrir l’humanité", poursuivait-il, affirmant que "l’accaparement des terres est une criminalité écologique".

Ancien journaliste, M. Mamère assurait que "Bastamag fait partie avec Reporterre de ces outils indispensables à la réflexion humaniste qui doit être menée dans notre société". Dénonçant la"conception quasi-totalitaire, césariste des moyens d’information" de M. Bolloré, qui possède Canal Plus et Direct Matin, le député interrogeait : "Il n’y a pas beaucoup dans ce pays de moyens d’information qui n’appartiennent pas à des marchands de canon et à des accapareurs de terres. N’est-il pas temps de protéger ceux qui sont indépendants ?"

Une préoccupation partagée par Pierre Haski, directeur de Rue 89 et poursuivi par M. Bolloré pour avoir relayé l’article incriminé dans la revue de presse de ce site. "Il y a une volonté maladive du groupe Bolloré qu’il n’y ait pas de débat public sur ses activités en Afrique. (...) On est dans le fait du prince, qui a beaucoup d’argent et bombarde la presse de ses poursuites." Ce qui conduit, selon lui, à une forme de censure : « On sait que si l’on écrit sur Bolloré en Afrique, on prend une plainte. Ce bombardement judiciaire conduit incontestablement à une auto-censure de la presse française, Me Baratelli a formidablement réussi son coup ».

« Ce n’est que la quatrième poursuite en six ans ! »

L’audience avait commencé à 13 h 30. Et ce n’est qu’à 19 h que les plaidoiries des avocats ont commencé. Le défenseur de la société Bolloré, Me Olivier Baratelli, a d’abord pris la parole, en cherchant à dénier la qualité journalistique de l’article. « Rien n’est jamais tout blanc ou tout noir, comme le laisse penser le réquisitoire de Bastamag. Il est tellement excessif, c’est un article qui ne mérite rien d’autre que de finir à la poubelle » a ainsi affirmé Me Baratelli. Avant de se tourner vers le banc des journalistes (outre Reporterre Arrêt sur images, Mediapart, France Culture, L’Humanité, Le Monde, suivaient le procès), pour leur faire la leçon : « Personne ne peut et ne doit écrire ça ! ».

Mais l’argumentaire s’est souvent réduit à des attaques ad hominem, à la limite de l’injure : « Le conditionnel est sûrement un temps que Mme Djabali n’a pas étudié à l’école ! », accusant plus tard la journaliste de photocopiage, puis d’avoir trouvé ses chiffres « tombés divinement du ciel » ou« dans une boule de cristal », avant de pointer un fait : « L’article mentionne ‘’pas moins de 13 ports’’  : Eh non, en fait la société Bolloré, c’est 104 ports partout dans le monde ! ».

Parlant près d’une heure et demie, Me Baratelli a ainsi enchaîné des contre-vérités – « il n’y a pas de syndicats au Cameroun » – en évacuant la question de l’accaparement des terres : « Il est sûrement vrai que des populations, à certains endroits, subissent un phénomène irrémédiable : l’accroissement de la population qui nécessite l’augmentation de la production alimentaire ».

Pourtant, Me Baratelli l’assurera, « le groupe Bolloré n’a jamais acheté un seul hectare de terre en Afrique », s’appuyant sur le flou autour des filiales du groupe, directement concernées par les accusations d’accaparement des terres. Cela ne l’a pas empêché de vanter les mérites des actions sociales du groupe : « Dispensaire, école, pharmacie… voilà aussi ce que fait Bolloré au Cameroun ! » regrettant que cela ne soit pas évoqués dans les « huit pages d’ineptie » de Bastamag.

En réalité, la plaidoirie du plaignant a surtout ressemblé à une auto-défense : « On accuse Bolloré d’être le grand museleur de la presse, mais j’opère pourtant un choix homéopathique des poursuites qu’on engage. Ce n’est que la quatrième en six ans, sur les activités agricoles et financières du groupe ! » s’est justifié Me Baratelli, avant de rappeler les condamnations qu’il a obtenues : France Inter en 2010Libération en 2014.

Pour Me Baratelli, « le monopole de la souffrance n’est pas du côté des ONG, c’est mon seul propos ». Il précise son idée : « Peut-on un instant penser que tout ce qui est reproché à Bolloré est vraisemblable ? Peut-on vraiment imaginer Vincent Bolloré commanditer directement de faire bosser des enfants de moins de 14 ans ? ».

Après sa longue plaidoirie, soutenue avec une condescendance marquée envers les uns et les autres, Me Corinne Lepage, avocate de la journaliste Dominique Martin-Ferrari, ramenait le débat sur la question des libertés d’internet : « On ne peut pas imposer une responsabilité en tant qu’auteur sur la republication d’un lien hypertexte », au risque de mettre fin au principe même de revue de presse, expliquait-elle. « Et comment appliquerait-on une telle jurisprudence à un outil comme Twitter, qui n’existe que pour ça ? »

Son associé, Me Benoit Denis, précisait que c’est la question de la valeur juridique du lien hypertexte que pose ce procès : « L’exercice d’une revue de presse peut-il être compris comme l’écriture d’un article ? », analysant la jurisprudence de la Cour de cassation. Evoquant un « procès qui aurait pu être évité », il était conforté par Me Raphaël Molenat, l’avocat de Laurent Ménard, blogueur poursuivi par M. Bolloré pour avoir relayé l’article sur son site. Son lien n’a comptabilisé que... sept clics ! « Pourquoi un tel acharnement ? s’est insurgé Me Molenat, indiquant que son client, ébéniste gagnant environ 1.800 euros par mois, n’avait fait son blog que dans le cadre des élections municipales de Saint-Julien, en Loire-Atlantique. J’appelle cela du mépris ! Il n’y a pas d’argument contre M. Ménard ».

Si ce père de famille – pour lequel son avocat a demande au tribunal de condamner M. Bolloré pour recours abusif et versement de dommages et intérêts – n’était pas présent à l’audience, Thierry Lamireau, autre bloggeur visé par la plainte, avait fait le déplacement depuis la Savoie.« Un coût psychologique et financier important, depuis trois ans, pour ce maître d’école à la retraite », a insisté son avocate, Me Magaly Lhotel, qui a dénoncé « la lâcheté du choix de la procédure de la plainte avec constitution de partie civile, avec mise en examen et sans mise en demeure préalable ». Et toujours, derrière, cette même question : « Mais que cherche-t-on à faire à travers ça ? » alors que l’article avait été copié-collé, sans autre commentaire, ni lien hypertexte.

Pour Me Antoine Comte, qui concluait, la démarche de M. Bolloré est « une instrumentalisation de la justice » dans ce qu’il a qualifié d’un « procès du pot de fer contre le pot de terre ». Sur l’accusation d’absence du contradictoire, l’avocat a rappelé la dernière jurisprudence : « Le contradictoire est souhaitable, bien sûr, mais en rien obligatoire lorsqu’il y a une base factuelle suffisante », soulignant que le travail de Bastamag - « engagé mais pas militant » - est basé sur des enquêtes longues, proche d’une presse de « recherche » : « 7 pages et 12 notes de bas de page, on est proche de la façon de travailler du Monde Diplomatique ».

Comme les autres avocats, il a demandé la relaxe et des dommages pour pousuite abusive. De son côté, Me Baratelli demandait un euro de dommages et intérêt, et la publication du jugement dans différents journaux.

Le verdict est mis en délibéré au 7 avril 2016.

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LE MONDE | 13.02.2016
 
 
Par Serge Michel
 
Comme souvent dans une audience, il y a des idées fixes des deux côtés. Celle d’Olivier Baratelli, c’est que son client, « l’ogre Bolloré », dit l’avocat, « l’abominable Bolloré », est victime en raison de sa richesse d’une telle suspicion de la part des journalistes qu’il peut être « accusé de n’importe quoi […], de crimes contre l’humanité », sans vérification.
 
Quant aux prévenus, dans ce procès en diffamation du 11 février devant la 17e chambre correctionnelle du tribunal de Paris, ils sont convaincus que le groupe Bolloré mène une « guérilla judiciaire » contre les articles qui ne lui plaisent pas. Pierre Haski, directeur de Rue89, parlera d’une « volonté maladive du groupe Bolloré d’empêcher que soit discuté ce qu’il fait en Afrique ».
 
« Brûlot » ou « travail très sérieux » ?
 
Le site Basta!, édité par l’association Alter-médias, a publié en octobre 2012 un article intitulé « Bolloré, Crédit agricole, Louis Dreyfus : ces groupes français, champions de l’accaparement de terres ». Il y est question de paysans « extorqués » en Afrique et en Asie ou de plantations d’hévéas au Liberia où travailleraient des enfants de moins de 14 ans. L’auteure principale, Nadia Djabali, n’est pas allée sur place mais s’est appuyée sur des rapports d’ONG qu’elle estime fiables. « Je n’ai pas appelé tout le monde », dit-elle. Ni le groupe Bolloré, ni le groupe luxembourgeois Socfin dont Bolloré possède 38,75 % des parts et qui exploite ces plantations.
 
Cet article est-il « un brûlot » ou un « travail très sérieux » ? Le délibéré sera rendu le 7 avril. En attendant, les neuf heures de débats ont porté sur les avantages comparés de l’agriculture industrielle ou familiale, mais aussi sur la méthode « rouleau compresseur » du groupe Bolloré, consistant à poursuivre non seulement Basta! mais aussi quatre sites, dont Rue89, ayant relayé l’article. Il y a là le blog d’un ébéniste de Loire-Atlantique qui gagne 1 600 euros par mois et qui, selon son avocat, ne dort plus depuis qu’il a été mis en examen, il y a trois ans, par le groupe appartenant à la 9e fortune de France (11,1 milliards d’euros, selon Challenges) pour un post de blog sur lequel n’ont cliqué que sept internautes, Me Baratelli compris.
 
« Nos poursuites sont homéopathiques », a clamé l’accusateur. Mais le voilà maintenant, et avec force, accusé de « mépris ». Est-il allé trop loin ? Jeudi 11 février, Me Baratelli a soudain ressenti le besoin de préciser que son père était aussi ébéniste.
 
Serge Michel 
Grand reporter
 
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Neuf journalistes et blogueurs comparaissaient jeudi après-midi devant le tribunal correctionnel de Paris pour avoir écrit ou partagé un article sur la politique d’accaparement du Groupe Bolloré.
L'Humanité | 12 février 2016
 
 
Marie Barbier
 
Neuf journalistes et blogueurs comparaissaient jeudi après-midi devant le tribunal correctionnel de Paris pour avoir écrit ou partagé un article sur la politique d’accaparement de la multinationale.
 
Raté. Vincent Bolloré voulait sans doute faire taire Bastamag et ses journalistes en les traînant devant la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris pour diffamation. En cause, un article publié par le site d’information le 10 octobre 2012, intitulé « Bolloré, Crédit agricole, Louis Dreyfus : ces groupes français, champions de l’accaparement des terres ».
 
Au contraire, le tribunal et les prévenus ont saisi cette occasion pour entrer dans le fond du sujet : l’accaparement des terres agricoles en Asie et en Afrique par des grands groupes qui privent les populations locales de ressources. Une fois ces terres trustées, « un modèle d’agriculture intensive est importé sur place », explique la journaliste de Bastamag Nadia Djabali, mais un modèle qui « emploie moins et produit moins » que les systèmes traditionnels. Les conséquences sont nombreuses : d’abord, « les paysans ne profitent pas de cette manne et vont plutôt rejoindre les bidonvilles ». La journaliste évoque aussi la pollution, le travail des enfants de moins de 14 ans, la déforestation des forêts primaires, etc. Le tout, « pour mettre de l’essence dans nos voitures ».
 
« La volonté presque maladive du groupe à stopper toute discussion »
 
Jeudi, par manque de place, les prévenus se sont entassés dans le box normalement réservé aux détenus. Six journalistes et trois blogueurs sont poursuivis par le groupe Bolloré SA pour avoir écrit ou partagé cet article dont huit passages sont mis en cause. Des passages qui accusent la stratégie de la multinationale, particulièrement en Afrique, mais aussi en Asie. En 1996, Vincent Bolloré acquiert ainsi 38 % de la Socfin, entreprise de caoutchouc créée sous l’empire colonial belge et devenue une holding luxembourgeoise. L’homme d’affaires français met ainsi « un pied, voire plus » dans le commerce d’hévéas et de palmiers à huile en Afrique. C’est cette même Socfin qui, en 2012, prend par exemple le contrôle de 6 500 hectares de terres en Sierra Leone. « Mais la population locale résiste », raconte la présidente du tribunal, qui cite un rapport : « Le groupe Bolloré poursuivait systématiquement les opposants pour les faire taire. » « La méthode est la même dans beaucoup d’États », assure la journaliste Nadia Djabali, elle-même poursuivie… « Il y a une volonté presque maladive du groupe Bolloré de stopper toute discussion, tout débat public de ce qu’il fait en Afrique », dénonce, à la barre, Pierre Haski, directeur de la publication du site Rue89, poursuivi pour avoir relayé dans sa « Vigie du Web » (une revue de presse) l’article de Bastamag. L’ex-journaliste de Libération accuse : « Il y a une autocensure aujourd’hui dans la presse française sur Bolloré, qui est due au bombardement judiciaire auquel nous sommes soumis. »
 
Le site d’information Bastamag, créé en 2008 et qui compte aujourd’hui quelque 800 000 visiteurs par mois, en témoigne : ils en sont à leur deuxième plainte pour diffamation (l’autre est toujours en cours). « Nous sommes un média indépendant, donc on ne s’autocensure pas, explique la journaliste Agnès Rousseaux, mais ces procès à répétition ont des conséquences financières pour un média comme le nôtre. »
 
Cité comme témoin moral, le député Noël Mamère (EELV) est venu dire à la barre combien les sites comme Bastamag et Reporterre étaient « indispensables à la réflexion sociale et environnementale ». « Quand 80 % de la presse est aux mains des marchands de canons, il faut protéger les médias indépendants », a conclu le député. Les réquisitions étaient attendues jeudi soir.
 
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L' Obs | 12-02-2016
 
 
L'industriel a traîné Bastamag et neuf journalistes et blogueurs en justice pour un article qui l'accuse d'accaparer des terres en Afrique. Bolloré tente-t-il de "museler" la presse ?
 
"Ce procès, c'est de l'intimidation. Bolloré se sert de nous pour régler ses comptes." Moins d'un quart d'heure avant l'audience, Julien Lusson, ancien directeur de Bastamag, n'est pas tout seul à bouillonner. Quelques autres esprits échaudés rôdent sur le plateau correctionnel, ce jeudi 11 février, au tribunal de grande instance de Paris, où la 17e chambre doit examiner une affaire de diffamation visant quatre journalistes du site d'actualité sociale et environnementale. "Ce procès est scandaleux, dégueulasse", s'emporte une des personnes venues en soutien. "C'est David contre Goliath", poétise Julien Lusson. 
 
Les "choix homéopathiques" de Bolloré
 
La question plane : qu'est-ce qui peut bien pousser un capitaine d'industrie - dix milliards d'euros de chiffre d'affaire - à traîner au tribunal correctionnel un petit média alternatif ? Pourquoi y mettre en cause aussi son cortège de relais sur internet, poursuivis en tant que "complices" du délit, des blogueurs, ainsi que Rue89 (filiale de l'Obs), représenté par son patron Pierre Haski, qui a signalé l'article dans une brève ? Qu'est-ce qui dicte ce "choix homéopathique", pour reprendre l'expression de l'avocat du groupe Bolloré, Me Olivier Baratelli ("s'il fallait que je rapporte toutes les diffamations, je ferais trois citations directes par jour") ? 
 
Au cours d'une audience de huit heures, à donner des maux de crâne, la salle comble a pu mesurer toute la densité de ce palpitant procès. Loin, très loin de se cantonner au cadre étroit d'une "atteinte faite à l'honneur ou à la considération" de Bolloré, comme le définit le droit en matière de diffamation, le procès était jubilatoire dans ses joutes, palpitant dans ses enjeux. Neufs prévenus, cinq témoins et huit avocats ont défilé à la barre : il s'est joué là le procès d'internet, du journalisme, du lien hypertexte, des nouvelles manières d'informer, de l'agrobusiness, de l'extorsion de terres, des grands groupes et des petits médias...
 
L'image de Bolloré écornée
 
Ce qui a déplu à Bolloré ? Un article, paru en octobre 2012 dans Basta, truffé de chiffres, de rapports d'ONG, d'études de think tanks, qui dénonce les "champions de l'accaparement de terre" en Afrique, et déplore les conditions de travail "calamiteuses" des ouvriers locaux. Parmi les entreprises citées dans l'article, Socfin. De cette société de holding luxembourgeoise, Bolloré est actionnaire à 38,75%.
 
Telle est donc la cible qu'ont visé les missiles judiciaires de l'industriel breton  : ses avocats ont repéré dans l'article incriminé huit passages litigieux, allant de l'ironie sur ses allures de "gentleman farmer", jusqu'à la mention de l'achat "d'anciennes entreprises coloniales", constatés par l'Oakland Institute.
 
Déjà épinglé pour sa censure d'un documentaire sur le Crédit Agricole en septembre dernier, l'homme d'affaires est aujourd'hui suspecté tous azimuts de vouloir "museler" la presse critique. Bolloré a-t-il une "volonté maladive" d'endiguer tout débat concernant ses activités en Afrique, comme le dit Haski ? Ce procès est-il la manifestation de son réflexe procédurier - "d'une guérilla judiciaire", tente même l'avocat d'un ébéniste qui comparaît pour avoir relayé l'article ? Est-ce au nom d'une "conception étriquée, totalitaire, césariste (sic) de l'information", que le magnat de la presse attaque Bastamag en justice, ainsi que l'affirme Noël Mamère, cité comme témoin ? A la barre, le député écologiste fulmine :
 
"Nous n'avons pas beaucoup de médias qui n'appartiennent pas à des marchands de canons ou des accapareurs de terre. N'est-il pas temps de les protéger ?"
 
Deux ténors du barreau
 
Au milieu de cette galerie, Maître Baratelli contemple sereinement le défilé des témoins et des prévenus. L'avocat du groupe Bolloré, pénaliste, classé deux années d'affilée parmi les 30 avocats les plus puissants de France par "GQ", est tout sourire. Volontiers provocateur, il lâche de temps en temps une pique à l'adresse de son rival, Maître Comte, l'avocat de Basta et de Rue89. Lui s'est fait connaître en défendant "Charlie Hebdo" et "Le Canard enchaîné". Mais entre ces deux ténors du barreau, il transparaît des rivalités mal digérées. Comme une bataille d'égo. 
 
Embourbés dans l'arborescence des filiales et sous-filiales de Socfin, les magistrats se perdent dans l'imbroglio ultra-complexe des parts de capital. Socfin, détenue à 39% par le groupe Bolloré, possède sa filiale Socfinasia à 55%, qui elle-même a 80% de la société KCD au Cameroun. Qui est responsable de quoi, dans la subtilité du droit des sociétés ? La longue chaîne de l'organigramme dilue-t-elle au fur et à mesure les responsabilités ?
 
"Par jeu de cascade, ces sociétés sont détenues pour partie par le groupe Bolloré", tranche la présidente de séance.
 
A la barre, Me Baratelli insiste : "Bolloré et Socfin, c'est deux choses très distinctes."
 
Les "raccourcis scandaleux" de Bastamag
 
Main dans la poche du pantalon, poitrine gonflée, Me Baratelli manie sarcasme, moqueries et provocations avec brio. L'article incriminé à la main, il vitupère contre les "raccourcis scandaleux" du "brulôt" Basta. "Personne ne peut et ne doit écrire ça", dit-il, à l'adresse du box des journalistes. Toute la profession se retrouve en accusation:
 
"Bolloré, c'est tellement vendeur, ça enclenche la moulinette médiatique. Socfin, ça n'intéresse personne".
 
Ses yeux pétillent sous ses lunettes rondes à écailles. "Bolloré peut s'enorgueillir de ce qu'il fait au Cameroun", soutient l'avocat. Son réquisitoire, émaillé de perles ("Il peut arriver de ci de là qu'il y ait des problèmes en Afrique") provoque des rires nerveux jusqu'au banc des avocats de la défense. 
 
Tacticien, il axe sa plaidoirie sur le sérieux de l'enquête, "prise par le petit bout de la lorgnette", jusqu'à repérer des "photocopiages" dans l'article, en comparant l'objet du litige avec un article du "Monde", aux tournures similaires. Point crucial : la journaliste doit prouver le sérieux de son enquête pour prouver sa bonne foi. Il réclame à chaque prévenu un euro de dommages et intérêts.
 
Le procès d'internet et du lien hypertexte
 
C'est aussi le procès des liens hypertextes, ceux qui ont conduit les lecteurs vers l'article incriminé. "Il y a une règle sur internet, faites ce que vous savez faire de mieux, et mettez des liens pour le reste", plaide Pierre Haski, en citant le blogueur Jeff Jarvis. "Troublant", dit-il, que des internautes comparaissent "simplement pour avoir pointé vers cet article, par le biais de revue de presse". "Ces gens se sont contentés de faire de la veille", s'indigne-t-il. 
 
Au terme d'une bataille de diverses plaidoiries - les parties n'ayant pas toutes le même avocat -, qui a couru jusqu'à 22 heures, Maître Antoine Comte plaide la bonne foi des journalistes de Basta et démonte la diffamation en axant sa défense sur la sémantique : "Qui peut croire qu'en utilisant le terme 'pillage', on impute une infraction pénale ? C'est du langage courant, on n'est pas dans une revue de droit !"
 
"On veut instrumentaliser votre justice. Parce que, comme ça [si vous donnez raison aux plaignants, NDLR], au Cambodge, au Libéria, au Sierra Leone, on dira que soutenir que Bolloré accapare des terres, c'est diffamatoire."
 
Délibérés le 7 avril. A la sortie, Me Comte peste : "Et tout ça pour un euro symbolique…"
 
Paul Conge
 
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TV5Monde | 11 février 2016
 
 
Le procès des journalistes de Bastamag et Rue89 s'est ouvert jeudi. Ils sont attaqués en justice par le groupe industriel Bolloré pour diffamation. Un article sur l'accaparement des terres en Afrique et en Asie est en cause.
 
Pascal Hérard
 
Le procès qu'intente ces jours-ci le groupe Bolloré à l'encontre des sites d'information Bastamag, Rue89, ainsi que plusieurs blogs, inquiète les défenseurs de la liberté de la presse, et au delà, pose la question des limites au droit d'informer et une autre, plus ancienne, datant de 2009, avait vu la victoire du groupe Bolloré sur un sujet très similaire.
 
Un reportage, puis un article choquent Vincent Bolloré
 
Le groupe Bolloré porte plainte en 2009 contre France Inter et l'un de ses journalistes, Benoit Collombat. Le reportage, diffusé dans l'émission "Interception" est intitulé « Cameroun : l’empire noir de Vincent Bolloré ». Il décrit les conditions de travail jugées désastreuses des dockers africains du port de Douala, ainsi que celles des ouvriers agricoles de diverses plantations. Ces structures sont toutes gérées par le groupe Bolloré. La multinationale gagne son procès en 2010 et publie sur son site le jugement.
 
Celui-ci relève notamment :
 
(…) Le tribunal a relevé le manque de sérieux de l’enquête et le manque de prudence dans l’expression de l’émission de France Inter et a estimé que Benoît Collombat n’avait pas vérifié les propos mensongers tenus par les personnes interviewées. Le tribunal a jugé comme diffamatoires les allégations suivantes :
 
-    ne pas avoir respecté les engagements financiers pris par Camrail lors de l’obtention de la concession en 1999, en particulier le versement à 603 employés d’une indemnité totale de 26 milliards [de francs CFA], laquelle resterait due,
-    négliger gravement les investissements dans le domaine du transport des passagers,
-    utiliser abusivement le personnel du port autonome [de Douala] dans le cadre de la concession de dragage,
-    ne pas offrir de couverture sociale aux salariés du port autonome de Douala et manquer aux exigences de la médecine préventive et du travail,
-    recourir à des tentatives d’intimidation à l’encontre des salariés du port autonome de Douala en cas de revendication, et ne pas respecter le droit du travail,
-    ne pas assurer la sécurité minimale des salariés de la palmeraie exploitée par la Socapalm et les loger dans des conditions indignes.
Le tribunal a considéré que France Inter avait été incapable d’apporter la preuve de ce qu’il avait affirmé. (…)
 
En 2012, un article sur le site d'information bastamag.net de la journaliste Nadia Djabali déclenche une nouvelle plainte  du groupe industriel. Cette fois-ci, le sujet est l'accaparement des terres agricoles en Afrique et en Asie par les multinationales, dont celle de Vincent Bolloré. L'article s'intitule : «Bolloré, Crédit agricole, Louis Dreyfus : ces groupes français, champions de l’accaparement de terres».
 
Du droit d'informer… au secret des affaires ?
 
L'article de Bastamag, se base sur des rapports d'ONG, dont le Think tank américain Oakland Institute. Il fournit les chiffres des rachats de terre en Afrique par le groupe Bolloré, leurs conséquences sur les populations, ainsi qu'un rapport de la Mission des Nations Unies au Libéria (Minul) décrivant les conditions catastrophiques des droits humains sur une plantation en Sierra Léone possession de Socfin (Socfinaf), une filiale luxembourgeoise du groupe Bolloré. Un rapport de la FIDH (Fédération internationale des droits de l'homme) est cité, pour des achats de terres en Asie toujours par Socfin (Socfinasia), terres normalement protégées.
 
C'est cet article qui est à l'origine de la plainte de 2012 pour diffamation de l'entreprise de Vincent Bolloré. Mais une autre plainte, toujours pour diffamation, a été ajoutée ensuite en 2014 à l'occasion de la publication d'une brève de Bastamag pour une rencontre entre des représentants africains de coopératives agricoles et le groupe Bolloré.
 
Le site de l'Obs, Rue89, et son directeur de publication Pierre Haski sont aussi assignés en justice pour avoir repris l'article de Bastamag dans leur revue de presse "le meilleur du web", ainsi que quatre blogueurs ayant partagé l'article : Thierry Lamireau, Dominique Martin-Ferrari, Laurent Ménard et Guillaume Decugis.
 
Ces plaintes en justice à l'encontre de sites extérieurs au site de publication d'origine, mettent à mal les principes de liens hypertexte, et de partage de l'information à travers Internet. Le droit d'informer et de partager l'information sur les activités des multinationales pourrait-il être durablement mis en cause avec ces  procès intentés par le groupe Bolloré ? Ces procès inquiètent d'autant plus que se prépare directive européenne sur le secret des affaires qui ne protègerait plus,  les journalistes ?
 
En janvier 2015, le gouvernement français proposait cette définition du secret des affaires : «Toute information non publique qui s’analyse comme un élément à part du potentiel scientifique et technique, des intérêts financiers et commerciaux revêtant en conséquence une valeur économique».
 
Cette définition était très large. Elle n'a finalement  n'a pas été retenue. Si tel avait été le cas, elle aurait donné raison au groupe de Vincent Bolloré : informer sur ses activités, sans son accord, n'aurait plus été vraiment possible. 
 
Au cours du procès public, un journaliste présent cite Pierre Haski, directeur de la publication de Rue89 appelé à la barre. « Il y a une volonté presque maladive du groupe Bolloré de stopper toute discussion, tout débat public de ce qu’il fait en Afrique » a dénoncé, à la barre, Pierre Haski, directeur de la publication du site Rue89. Des propos rapportés par le journal l'Humanité.
 
Et il semble se désoler du silence de ses confrères sur ces affaires :

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Noël Mamère, cité comme témoin, n'a, semble-t-il, pas maché ses mots :
 
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Le verdict à venir du procès du groupe Bolloré contre Bastamag et Rue 89 est néanmoins une épée de Damoclès pour la liberté de la presse. Si le groupe de Vincent Bolloré gagnait, la presse française oserait-elle encore informer de façon critique, sur les activités de la multinationale ?

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Le Courrier | 16 février 2016

Un site d’information accusé de diffamation

Pierre Lagnel

Bastamag s'est justifié jeudi devant les juges des accusations portées à son encontre par le groupe Bolloré, qui possède de nombreuses participations dans des exploitations agricoles dans les pays du Sud.

Le groupe Bolloré a porté plainte contre Bastamag, un site français d'informations «économiques, sociales et environnementales» dont l'audience ne cesse de monter (800 000 visiteurs par mois). Neuf passages d'un article intitulé «Bolloré, Crédit agricole, Louis Dreyfus: ces groupes français, champions de l'accaparement de terres» et publié le 10 octobre 2012 relèveraient du «délit de diffamation publique envers un particulier». Le particulier en question n'est autre que Vincent Bolloré, la neuvième fortune de France en 2015, selon le classement établi par le magazine économique Challenges.

Trois journalistes – Nadia Djabali, l'auteure principale, Agnès Rousseaux et Ivan du Roy, les coauteurs – ainsi que le directeur de publication (à l'époque, Julien Lusson) ont répondu de ce chef d'accusation, ce jeudi 11 février, au Tribunal de grande instance, à Paris. La plainte vise également le site Rue 89 (1,5 million de visiteurs) et son directeur de publication, Pierre Haski, pour avoir cité l'article dans sa revue de presse. Il était accompagné d'une journaliste d'un autre site et de trois blogueurs ayant partagé l'article.

Le travail de Bastamag faisait la synthèse de plusieurs rapports d'ONG – Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH), Grain, etc. – et des Nations Unies relatant l'accaparement des terres en Afrique, en Amérique latine et en Asie par des investisseurs désireux de transformer des zones de maraîchage ou de forêts tropicales en immenses exploitations d'hévéas ou de palmiers à huile pour l'exportation.

«Tableau très noir»

Les situations rencontrées varient selon les pays, mais les ONG, dont certains représentants étaient venus témoigner, ont constaté des expulsions forcées, un processus de déforestation et de pollution, l'utilisation d'OGM, etc. L'ONU a même fait état d'enfants de moins de 14 ans travaillant sur des plantations au Libéria. Un nom revient sans cesse: celui de la holding luxembourgeoise Socfin. Face à ce «tableau très noir», la présidente du tribunal, Fabienne Siredey-Garnier, résume les réponses de la Socfin à plusieurs rapports: «Tout cela est faux.»

L'avocat du groupe Bolloré, Olivier Baratelli, approuve: «Et je rappelle que je ne représente pas la Socfin!» appuie-t-il. Toute une partie de son argumentation repose sur le fait que son client ne détient que 37,85% de la Socfin et que par conséquent, en tant qu'actionnaire minoritaire, le groupe français ne dirige pas l'activité de la holding luxembourgeoise, ni des filiales de cette dernière.

«Vous êtes dans un tribunal. Vous pouvez donc tout dire, ou presque.» Grâce aux questions précises et aux encouragements de Fabienne Siredey-Garnier, les conditions exactes de l'écriture de l'article incriminé ont été exposées devant le tribunal. «L'accaparement des terres et la responsabilité sociale et environnementale des entreprises sont des thèmes qu'il nous semblait important de livrer au débat public», a précisé d'une voix forte et assurée Julien Lusson, l'ancien directeur de publication de Bastamag. L'article traite d'un phénomène et évoque longuement l'implication de plusieurs acteurs: quatre groupes d'investisseurs américains et plusieurs firmes françaises, comme Axa ou le Crédit agricole.

Assise financière fragile

Le choix a été fait de confier sa conception à Nadia Djabali, une journaliste chevronnée et spécialisée dans les questions d'agriculture. Cette dernière a détaillé comment elle avait sélectionné des sources qui lui paraissaient «irréprochables», compte tenu du fait qu'elle n'avait pas pu se rendre elle-même sur place. Elle a reconnu ne pas avoir contacté le groupe Bolloré, estimant qu'elle disposait de suffisamment d'éléments «pour présenter une vision contradictoire des situations, à condition de mentionner les réactions de la Socfin; ce que nous avons fait». Puis Agnès Rousseaux a rappelé que la synthèse, une fois rédigée, avait encore fait l'objet de vérifications multiples par les coauteurs. Ivan du Roy, quant à lui, a justifié l'évocation du groupe Bolloré car celui-ci «se présente comme un actionnaire important de la Socfin».

Plusieurs mis en cause se sont interrogés sur la pratique du groupe Bolloré de demander très souvent des droits de réponse et d'assigner fréquemment des titres de presse. «Parfois, les journalistes apprennent à prendre plus de recul», s'est justifié avec ironie Oliver Baratelli. La procédure a déjà coûté 7000 euros à un site indépendant qui ne vit qu'avec les dons de ses lecteurs, l'apport de fondations et de subventions. Un équilibre fragile. La décision du tribunal a été renvoyée en délibéré.
 
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