Socfin doit mettre fin aux accaparements de terres

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Plusieurs ONG ont interpellé hier les actionnaires de Socfin à l'occasion de son assemblée générale. (Photo : FIAN)
L'Echo | 02 juin 2016

Socfin doit mettre fin aux accaparements de terres

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Oxfam-Solidarité

L'Echo du 8 mai 2016 publiait une interview du CEO de l'entreprise agro-industrielle Socfin intitulé "L'agriculture traditionnelle africaine ne nourrit pas les villes". Nos organisations souhaitent réagir à certaines déclarations contenues dans cette interview.

Tout d'abord, au niveau du développement agricole, Luc Boedt (NDLR: CEO de Socfin) tente de faire passer l'idée que l'agro-industrie constituerait la seule voie réaliste pour développer le potentiel agricole des pays africains.

Cette vision est en contradiction avec un nombre croissant de rapports scientifiques et d'avis d'experts internationaux (comme les avis du Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à l'alimentation), qui mettent en évidence les limites du modèle agro-industriel hérité du 20e siècle (destruction de la biodiversité, dépendance au pétrole et émission de gaz à effet de serre, exploitations des ressources par des grands groupes mondialisés aux dépens des populations locales) et mettent en avant les alternatives d'une agriculture à petite échelle, basée sur des principes agroécologiques, plus respectueuse de l'environnement, plus productive à l'hectare et offrant des opportunités économiques plus intéressantes pour sortir les petits paysans de la pauvreté.

Rappelons que les Nations Unies ont déclaré 2014 "Année internationale de l'agriculture familiale", renforçant le consensus international qui se dégage, bien au-delà des ONG, sur la nécessité de soutenir l'agriculture familiale durable comme modèle agricole du futur.

Redorer le blason

Plus pernicieux, Luc Boedt avance certains faits et chiffres pour redorer le blason de son entreprise (dont les pratiques sociales et environnementales sont décriées par la presse et les ONG), mais qui s'avèrent erronés.

Prenant le cas de la Sierra Leone, Luc Boedt avance que "outre les 12.500 hectares de palmiers à huile que nous y exploitons (...), nous y avons créé près de 2.000 hectares de plantations de riz pour les villageois de toute la région". D'après un rapport réalisé pour l'IFC (branche de financement du secteur privé de la Banque mondiale), il s'agirait tout au plus de 190 ha de terres et 282 ha de zones marécageuses...

S'agissant de l'IFC justement, l'article laisse entendre que Socfin a le soutien de cette institution, "ce qui certifierait en quelque sorte [son] action". S'il est vrai qu'une procédure a été initiée pour un prêt de 150 millions d'euros, elle a précisément été suspendue par l'IFC, notamment suite à des rapports d'évaluation indiquant "des écarts importants entre la performance opérationnelle de la société Socfin et les bonnes pratiques de l'industrie internationale en matière de gestion environnementale et sociale".

Monsieur Boedt déclare préférer collaborer avec les ONG allemandes, plus pragmatiques que les ONG belges. Dans les rapports d'activités du groupe, on ne retrouve toutefois pas de collaboration avec des ONG allemandes, mais bien avec la DEG, qui est une institution financière de développement allemande, ce qui n'a rien à voir avec une ONG...

Conflits fonciers et sociaux

Enfin et surtout, l'article pèche par omission en passant totalement sous silence les nombreux conflits fonciers et sociaux qui ont éclaté dans plusieurs plantations gérées par Socfin. Face aux abus de l'entreprise, les communautés locales se sont organisées aux niveaux local et international pour faire valoir leurs revendications.

Dès 2013, une "Alliance internationale des riverains des plantations Socfin/Bolloré" a été mise sur pied. À plusieurs reprises les représentants de l'Alliance ont fait valoir les droits des communautés et ont présenté leurs revendications au groupe Socfin/Bolloré, sans réelles avancées à ce jour. Socfin préfère faire la sourde oreille en déclarant dans un communiqué officiel que "la référence à de tels conflits sociaux relève du fantasme". Dans une précédente interview, Luc Boedt se disait d'ailleurs "exaspéré par les actions des ONG alignant les mensonges les uns après les autres à notre sujet".

N'en déplaise à Socfin, il relève de notre mission en tant qu'ONG de faire entendre les voix des populations marginalisées et de défendre leurs droits fondamentaux.

C'est dans cette perspective que nous sommes venus présenter les revendications des communautés aux actionnaires de Socfin lors de son Assemblée générale ce mercredi 1er juin. Nous demandons encore une fois à Socfin d'ouvrir la voie du dialogue pour mettre fin aux conflits sociaux. 

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